14.2.07

Sondage instantané


Petit dîner entre amis, l’autre soir. La discussion porte, évidemment, sur la politique et j’écoute avec intérêt les arguments des uns et des autres.

Albert, 55 ans, chef d’une PME prospère, me confie qu’il votera Sarkozy. « J’ai été de ceux qui ont fait élire Mitterrand en 81. J’avais vingt ans, ça me paraissait normal. Mais cette fois-ci, Sarkozy est le seul a présenter un programme réaliste. Ségolène Royal n’a pas de projet sérieux, c’est de la poudre aux yeux ». Sa femme Géraldine votera comme lui : « Sarko, il est bon. Je l’ai vu à la télé, franchement il assure ».

Danièle, 40 ans, assistante sociale, votera Ségolène, parce qu’elle ne peut pas voter pour Sarkozy. C’est comme ça, c’est génétique. Lorsque je lui demande si elle a étudié les propositions des uns et des autres, elle répond qu’elle en a vaguement entendu parler mais que c’est surtout une question de personne et d’orientation politique. Idem pour Cécile, 42 ans.

Son compagnon, René, 48 ans, dirige un organisme social local. Il affiche une certaine conscience politique, s’informe sur le net et suit de nombreux reportages à la télé. « Bayrou n’est pas mal, mais il est un peu tiède. Et puis, l’UDF c’est la droite malgré tout, même s’il s’est gauchisé. Sarkozy, il a quand même dit des choses énormes. Ségolène Royal, pour l’intant elle n’a pas été très convaincante, mais attendons de voir ». Bref, il ne sait pas encore quel choix faire, mais son cœur penche à gauche et se garde une possibilité pour Bayrou.

Jacques, 48 ans, informaticien, me surprend. Il a toujours voté à gauche. C’est un type « cool » qui fume des pétards et a longtemps travaillé à mi-temps, plus attiré par la qualité de la vie que par la réussite financière. Il me parle « business », m’explique que la France doit se relever, qu’il faut que les entreprises tournent, et que ce n’est pas avec un programme socialiste et électoraliste qu’on y arrivera. Il votera Sarkozy. Je lui demande s’il a étudié le programme des candidats. Non, pas vraiment, mais il sait que c’est grâce à Sarkozy qu’il a pu s’acheter son appartement, grâce à la loi qui débloquait l’épargne salariale. Une forme de reconnaissance du ventre, donc.

Jonathan, 18 ans, en prépa Sciences Po. Il vote à gauche. A-t-il étudié les programmes des uns et des autres ? Non, enfin un peu quand même, mais pas trop. Inutile, puisque de toutes façons il vote à gauche.

Je retire plusieurs enseignements de ce petit sondage : d’abord, que Sarkozy a séduit trois anciens électeurs de gauche, une séduction d’autant plus facile qu’ils se situent dans des tranches d’âge ou l’on a tendance à vouloir protéger ses acquis.

Trois personnes voteront Ségolène, parce qu’elles ont le vote socialiste au cœur et qu’elles abhorrent Sarkozy l’ultra-libéral qui karchérise les cités. Elles n’ont aucune idée du programme des uns et des autres, pas plus que Jacques l’informaticien ni Géraldine. Autrement dit, sur 7 personnes, seulement 2 ( soit 28%) ont vaguement étudié le programme : les 5 autres voteront véritablement à la tête du client, ou par fidélité organique.

Toute la politique moderne se trouve résumée là. Fi des idées, des propositions. Le look compte plus.

Comme dit le proverbe, « ce sont les tonneaux creux qui font le plus de bruit ».

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